Michel Serres : « L’adoption est la “bonne nouvelle” de l’évangile » Le philosophe Michel Serres se souvient de Vatican II.
« Ce que l’église peut apporter au monde aujourd’hui, c’est le modèle de la Sainte Famille. Ce modèle se trouve dans l’Évangile de saint Luc. On y lit que le père n’est pas le père – puisqu’il est le père adoptif, il n’est pas le père naturel –, le fils n’est pas le fils – il n’est pas le fils naturel. Quant à la mère, forcément, on ne peut pas faire qu’elle ne soit pas la mère naturelle, mais on y ajoute quelque chose qui est décisif, c’est qu’elle est vierge. Par conséquent, la Sainte Famille est une famille qui rompt complètement avec toutes les généalogies antiques, en ce qu’elle est fondée sur l’adoption, c’est-à-dire sur le choix par amour. Ce modèle est extraordinairement moderne. Il invente de nouvelles structures élémentaires de la parenté, basées sur la parole du Christ : « Aimez-vous les uns les autres » . Depuis lors, il est normal que dans la société civile et religieuse, je puisse appeler « ma mère » une religieuse qui a l’âge d’être ma fille. Ce modèle de l’adoption traverse l’Évangile. Sur la croix, Jésus n’a pas hésité à dire à Marie, en parlant de Jean : « Mère, voici ton fils. » Il a de nouveau fabriqué une famille qui n’était pas naturelle. Je n’ai pas la prétention de dicter quoi que ce soit de sa conduite à l’Église, mais puisque vous me demandez ce qu’elle peut apporter aujourd’hui, je crois que là se trouve une parole pour notre temps, où se posent tant de questions autour des modèles de la parenté, du mariage homosexuel, etc. Le modèle de la Sainte Famille permet de comprendre les évolutions modernes autour de la famille et de les bénir. Aujourd’hui, on dit souvent qu’un fossé se creuse entre l’Église et la société autour des questions familiales. Pour ma part, je constate que ce fossé est déjà comblé depuis deux millénaires. Je ne l’ai pas découvert, c’est déjà écrit dans l’Évangile de Luc. Aujourd’hui, il s’agit de faire valoir cet « Aimez-vous les uns les autres » comme régulateur de ces nouvelles relations familiales. « Adoption », vient du latin optare , qui veut dire choix. La religion chrétienne est une religion de l’adoption. L’Évangile nous dit que l’on ne devient père ou mère que si on adopte nos enfants. On ne devient père ou mère, même si l’on est un père ou une mère naturel (le), que le jour où on dit à son fils : « Je te choisis par amour ». Tel est le modèle de la Sainte Famille. La loi naturelle n’existe plus, c’est la loi d’amour qui compte en premier. Je crois que l’adoption est la “bonne nouvelle” de l’Évangile. Avant l’Évangile, il y avait la généalogie, les lois tribales, c’est-à-dire les lois par héritage. Aujourd’hui encore, ce qui rend impossible l’arrivée de la démocratie, ce sont des luttes entre familles, entre tribus, les clans, comme autrefois dans le Moyen-Orient antique. La nouveauté extraordinaire du point de vue politique, anthropologique et moral du christianisme, c’est d’avoir supprimé cet héritage naturel et d’y avoir substitué l’adoption, le choix délibéré et libre par amour. »
Michel Serres: « Adoption is the » good news « of the gospel » The philosopher Michel Serres remembers Vatican II.
« What the church can bring to the world today is the model of the Holy Family. This model is found in the Gospel of St. Luke. It says that the father is not the father – because he is the adoptive father is not the biological father – the son is not the son – it is not the natural son. As for the mother, obviously, you can not do it is not the natural mother, but it adds something that is decisive is that it is blank. Therefore, the Holy Family is a family that breaks completely with all genealogies ancient, as it is based on the adoption, that is to say on the choice of love. This model is extremely modern. He invents new elementary structures of kinship, based on the words of Christ: « Love one another. » Since then, it is normal that in the civil and religious society, I can call « my mother » a nun who was old enough to be my daughter. This model of adoption through the gospel. On the cross, Jesus did not hesitate to say to Mary, speaking of John: « Mother, behold your son. « He again made a family that was not natural. I do not presume to dictate anything to his conduct to the Church, but since you ask me what it can do today, I think there is a word for our time, where ask so many questions about models of kinship, gay marriage, etc.. The model of the Holy Family to understand the modern developments around the family and bless them. Today, it is often a gap between the Church and the society around family issues. For my part, I find that this gap is already closed for two millennia. I have not discovered it is already written in the Gospel of Luke. Today, it is to assert that « Love each other » as a regulator of the new family relationships. « Adoption » comes from the Latin optare, which means choice. The Christian religion is a religion of adoption. The Gospel tells us that no one becomes a parent that if we adopt our children. You do not become a parent, even if you are a father or mother nature (the), the day we said to her son: « I have chosen you out of love. » This is the model of the Holy Family. Natural law no longer exists, it is the law of love that counts first. I think adoption is the « good news » of the gospel. Before the Gospel, there was genealogy, tribal laws, that is to say through inheritance laws. Even today, making it impossible arrival of democracy, they are struggles between families, between tribes, clans, as formerly in the ancient Middle East. Novelty extraordinary political perspective, anthropological and moral Christianity is to have removed this natural heritage and to have substituted the adoption, by deliberate choice and free love. ‘